Conte
amérindien
C'était
un temps où le temps était encore dans le temps.
Un tic-tac de seconde dans la nuit des temps…
Quand on pouvait prendre tout le temps du monde dans un instant.
La terre était dans le ciel, le ciel était dans la lune et la lune était
dans mon œil, c'est vous dire que c'était il y a longtemps…
L'humanité
traversait une époque de grande sécheresse .
Les sages, les érudits, les grands sorciers s'étaient réunis afin de percer
le mystère de la pluie, mais rien n'y fit…
Un serpent leurs proposa de l'aide, un de ces tout petits qui ne paye
pas de mine… Les hommes se moquèrent de lui « Toi si petit, tu voudrais
nous aider »
L'un d'eux s'en saisit et le lança si fort… que le serpent se déroula
d'un bout à l'autre de la terre… accrochant au passage de ses écailles,
la voûte céleste…
Des morceaux de glace se sont détachés et en tombant ont donné la pluie…
et c'est ainsi que la terre a refleurit, sous l'arche chatoyante du premier
arc-en-ciel…
La vérité, quand elle a beaucoup vieilli, prend quelques fois la couleur
de la légende et le rêve tout frais de la nuit sera peut-être la vérité
de demain..
Une
petite histoire …
Avant que le monde
ne se vide de ses dieux, il existait dans une lointaine contrée,
une montagne sacrée dont l’écho rendait le son de
la vérité.
Il suffisait de se
dresser face à elle et de confier aux vents violents les secrets
de son cœur ou de lancer les énigmes les plus impénétrables
dont les réponses revenaient bientôt s’élevant
de la masse pierreuse en un écho assourdissant.
Ce jour là,
3 hommes de religions différentes décidèrent de se
rendre au pied de la montagne sacrée.
Une querelle d’importance
les opposait depuis bien longtemps :
Quel Dieu est le bon
?
Quel Dieu doit-on craindre?
Quels textes religieux faut-il vénérer?
Pour convaincre ses deux interlocuteurs sceptiques que seul son Dieu mérite
d’être vénéré, le Chrétien se
dresse fièrement au bord du précipice et crie :
« Montagne sacrée,
fais que ton écho me donne raison !
N’est-il pas écrit dans la Bible qu’Il est notre seul
seigneur ? »
Au bout d’une
minute, les vents se font plus violents et l’écho gronde
une réponse :
« Tu dis vrai,
Chrétien, il n’y a qu’un seul Dieu. C’est celui
que tu vénères ».
Satisfait, le Chrétien
se tourne vers les deux autres :
« Ne vous l’avais-je
pas dit ? »
« Impossible
! Rétorque son compagnon juif, c’est la Tora qui renferme
la vérité. »
A son tour il s’avance
au bord du gouffre et lance :
« Echo, pourquoi
ne leur dis-tu pas que c’est moi qui suis le vrai croyant ici ?
La Tora dit «
Écoute Israël, l’Éternel est notre Dieu, l’Éternel
est un » ?
Et l’Echo répond:
« C’est vrai. Dieu est unique et c’est lui que tu adores
».
« Fils de mécréants
s’insurge soudain le frère musulman, c’est mon écho
qui aura le dernier mot. »
Il gonfle sa poitrine
et hurle :
« Echo, je te
somme de dire la vérité. N’est-ce pas moi qui suis
dans le vrai et mes frères dans le péché car le Coran
dit :
»Il n’y
a pas de dieu en dehors de Dieu »!
Pour la troisième
fois, l’écho rendit le son du vrai :
« Précisément,
il n’y a pas d’autre Dieu que celui que tu viens de citer
».
Mais les 3 hommes restèrent
muets.
Comment l’Écho
– qui dit toujours la vérité – pouvait-il assurer
que leur dieu respectif était le seul vrai Dieu ?
Pas question de repartir
sans exiger une dernière explication.
L’un d’eux
alors se risqua et invoqua l’Écho en ces termes :
« Tu ne peux
nous tromper ainsi, Écho. Il faut, pour que nos cœurs soient
apaisés, que la vérité se fasse « .
Pour la dernière
fois, la montagne résonna et l’Écho, porté
par les vents assourdissants vint frapper les 3 paires d’oreilles
:
« Hommes! Quand
comprendrez-vous que vous adorez le même Dieu depuis le début
des temps et qu’il ne prend la parole que pour vous dire à
tous la même chose. Vous êtes comme le sourd qui accuse celui
qui parle de ne pas le faire assez fort… »
« Quiconque honore
sa religion et condamne les autres nuit gravement à sa propre religion
».
« Shafique Keshavjee
»

Noël
2009...Les bons voeux de Paulo Coelho
Une
vieille légende bien connue dont l’origine est invérifiable
raconte qu’une semaine avant Noël l’archange Michel demanda
à ses anges d’aller visiter la Terre ; il désirait
savoir si tout était prêt pour la célébration
de la naissance de Jésus-Christ. Il les envoya deux par deux, toujours
un vieil ange avec un plus jeune, de manière à se faire
une opinion plus complète de ce qui se passait dans la Chrétienté.
L’un de ces duos fut désigné pour le Brésil,
et ils arrivèrent tard le soir. Comme ils n’avaient nulle
part où dormir, ils demandèrent abri dans une des grandes
demeures que l’on peut voir dans certains endroits à Rio
de Janeiro.
Le maître de maison, un noble au bord de la faillite (ce qui, soit
dit en passant, arrive à beaucoup de gens qui habitent cette ville),
était un catholique fervent, et il reconnut tout de suite les envoyés
du Ciel aux auréoles dorées qui surmontaient leur tête.
Mais il était très occupé,
il préparait une grande fête pour célébrer
Noël et il ne voulait pas défaire la décoration presque
terminée : il les pria d’aller dormir dans la cave.
Bien que les cartes de voeux soient toujours illustrées d’une
chute de neige, au Brésil la date tombe en plein été
; là où les anges furent envoyés, il faisait une
chaleur terrible, et l’air, chargé d’humidité,
était quasi irrespirable. Ils se couchèrent sur un sol dur,
mais avant de commencer ses prières, le vieil ange remarqua une
fente dans le mur. Il se leva, la répara en se servant de ses pouvoirs
divins, et retourna à sa prière nocturne. Ils passèrent
une nuit d’enfer, tellement il faisait chaud. Ils dormirent très
mal, mais ils devaient accomplir la mission que Dieu leur avait confiée.
Le lendemain, ils parcoururent la grande ville – avec ses douze
millions d’habitants, ses plages et ses montagnes, ses contrastes,
ses beaux paysages et ses recoins horribles. Ils remplirent des rapports,
et quand la nuit tomba de nouveau, ils entreprirent de se rendre dans
l’intérieur du pays. Mais,
trompés par le décalage horaire, ils se trouvèrent
de nouveau sans lieu où dormir.
Ils frappèrent à la porte d’une humble maison, où
un couple vint les accueillir. Comme ils n’avaient pas accès
aux gravures médiévales qui représentaient les messagers
de Dieu, ils ne reconnurent pas les deux pèlerins – mais
s’ils avaient besoin d’un abri, la maison était à
eux. Ils préparèrent un dîner, présentèrent
le petit nouveau-né et offrirent leur propre chambre, s’excusant
parce qu’ils étaient pauvres, il faisait très chaud,
mais ils n’avaient pas d’argent pour acheter un appareil d’air
conditionné.
Quand les pèlerins se réveillèrent le jour suivant,
ils trouvèrent le couple en larmes. Leur seule possession, une
vache qui donnait du lait, du fromage et de quoi nourrir la famille, avait
été retrouvée morte dans le champ. Ils prirent congé
des visiteurs, honteux de ne pouvoir préparer un petit déjeuner.
Tandis qu’ils marchaient sur la route de terre, le jeune ange manifesta
sa révolte : « Je ne peux pas comprendre cette manière
d’agir ! Le premier homme avait tout ce dont il avait besoin, et
pourtant tu l’as aidé. Quant à ce pauvre couple qui
nous a si bien reçus, tu n’as rien fait pour soulager sa
souffrance !
– Les choses ne sont pas ce qu’elles paraissent, dit le vieil
ange. Quand nous étions dans cette horrible cave, j’ai remarqué
qu’il y avait beaucoup d’or emmagasiné dans le mur
de cette grande maison, laissé là par un ancien propriétaire.
La fente laissait voir une partie du trésor, et j’ai décidé
de le cacher de nouveau, parce que le maître de maison ne savait
pas aider ceux qui en avaient besoin.
« Hier, pendant que nous dormions dans le lit que le couple nous
avait offert, j’ai noté qu’un troisième invité
était arrivé : l’ange de la mort. Il était
envoyé pour emmener l’enfant, mais comme je le connais depuis
des années, je l’ai convaincu de prendre la vie de la vache
à sa place.
« Souviens-toi du jour que l’on se prépare à
fêter. Comme les gens accordent beaucoup de valeur à l’apparence,
personne n’a voulu recevoir Marie. Mais les bergers l’ont
accueillie, et pour cette raison, ils ont eu la grâce d’être
les premiers à contempler le sourire du Sauveur
du Monde. »
D’OÙ VIENT LE SAPIN DES FÊTES ?
ET LE PÈRE NOËL ?
Noël a remplacé l’antique fête païenne du
Sol invictus (Soleil invaincu), vers l’an 300. Jusqu’alors,
on célébrait le solstice d’hiver, soit le retour de
la Lumière, puisque vers le 21 décembre, le jour le plus
court de l’année, les jours commencent à rallonger,
ce qui se poursuit jusqu’au solstice d’été.
Mais, d’après un très ancien manuscrit, la tradition
du sapin de Noël ne remonterait pas tout à fait aussi loin.
La meilleure hypothèse veut qu’il soit apparu avec un missionnaire,
saint Colomban, vers les années 615. Ce moine irlandais, passé
en France pour y construire un monastère, se promenait autant dans
ce pays qu’en Italie pour prêcher l’Évangile
et les hauts faits de Jésus, pour commencer à convertir
les païens d’Europe à la foi chrétienne. Un jour
qu’il passait dans une ville où personne ne daignait venir
écouter ses sermons, il eut une idée géniale. Il
se dit que s’il garnissait un sapin de torches, un arbre qui garde
sa parure verte tout au long de la saison froide, il pourrait engendrer
un spectacle intriguant qui pourrait probablement attirer à lui
quelques curieux. Ainsi, il monta dans la montagne voisine et il identifia
un sapin de belle taille qu’il couvrit de flambeaux. Le soir venu,
il les alluma tous à la fois. Les citoyens des environs accoururent
en nombre pour se rendre compte de ce qui se passait. Ils y trouvèrent
l’homme d’église qui leur raconta la naissance du Messie,
qui s’était incarné pour apporter le salut au monde,
d’où il put faire plusieurs convertis. Pour commémorer
cette rencontre évangélique, les nouveaux Chrétiens
décidèrent d’installer chaque année des sapins
illuminés, lançant cette coutume dans le monde. Car, d’âge
en âge, d’autres congénères ne tardèrent
pas à l’importer dans leur patelin, d’où elle
est parvenue jusqu’à nous.
Les Chrétiens les plus fervents se sont longtemps opposés
aux dérivations de la Noël pour maintenir intact la mission
salvifique de Jésus. N’empêche que, avec le temps,
à la période des Fêtes, est apparu en Europe orientale,
le généreux évêque saint Nicolas, appelé
ailleurs Santa Claus ou Kris Kringle, qui portait une mitre et une crosse.
Il était lui-même issu de Basil de Césarée,
un personnage du folklore grec de rite byzantin, qu’on célébrait
le premier janvier par l’échange de cadeaux, et qui finit
par ravir largement sa place.
Puis apparut le Père Noël, un personnage purement laïc.
Malgré qu’il soit fermement implanté dans les mœurs
de nos contemporains, ce dernier ne date pas de très loin. Il a
débarqué dans nos pays avec les États-uniens. Il
date de la montée du capitalisme qui, pour faire vendre davantage,
lança la mode des grands sapins illuminés autant aux carrefours
que dans les rues des villes. Malgré une forte opposition de l’Église
chrétienne, qui craignaient de voir la période des Fêtes
désacralisée, la promotion des industriels, des commerçants
et des moyens de communication de masse l’imposa vite aux populations.
Ainsi, il ne tarda pas à détrôner ici saint Martin,
là saint Nicolas là, balayant ailleurs le Bonhomme Janvier,
allant jusqu’à déloger Tante Arie dans la région
de Montbéliard (France) et le Petit Jésus un peu partout
à travers le monde. Au fil des ans, il emprunta à l’un
et à l’autre quelques traits typiques, prenant chez les Anglo-saxons
son costume voyant et retenant également de saint Nicolas, sa longue
barbe, de saint Martin, sa grande bonté, et de Tante Arie, son
mode étrange de pénétrer dans les maisons par la
cheminée.
Pour
ce qui a trait au Père Noël, qui dérive de saint Nicolas,
il a été importé aux États-Unis au 17e siècle
par des colons allemands ou hollandais. Grâce à l’ampleur
commerciale que la presse a su lui donner, après avoir subi quelques
transformations, il est repassé en Europe, où il achève
de détrôner son ancêtre. En 1821, un pasteur américain,
du nom de Clément Clarke Moore, écrivit un conte de Noël
poétique, intitulé A visit from St-Nicholas, pour ses propres.
Il y fit apparaître un personnage sympathique, dodu, jovial, souriant,
couvert d’un bonnet et pourvu d’une canne de sucre d’orge,
qui se déplaçait dans un traîneau tiré par
des rennes fringants, plutôt que de monter à dos d’âne,
le débarrassant en outre du Père Fouettard. remplaça
la mitre du Saint Nicolas par un bonnet, sa crosse par un sucre d'orge
et le débarrassa du Père Fouettard. Plusieurs grands quotidiens
américains reprirent ce récit, d’abord paru dans le
journal The Sentinel de New York, en 1823, les années suivantes.
Il finit par être traduit en plusieurs langues et diffusé
dans le monde entier.
En 1860, Thomas Nast, un illustrateur et caricaturiste au journal new-yorkais
Harper’s Illustrated Weekly, revêtit le personnage d’un
costume rouge, garni de fourrure blanche et rehaussé d’un
large ceinturon de cuir. Cinq ans plus tard, ce même homme établissait
la résidence officielle du sympathique personnage au Pôle
Nord dans un dessin illustrant deux enfants regardant le tracé
de son parcours sur une carte du monde depuis ce lieu lointain jusqu’aux
États-Unis. L’année suivant, l’écrivain
George P. Webster reprenait cette idée, précisant que sa
fabrique de jouets et son domicile restaient enfouis dans la glace et
la neige pendant les longs mois d’été.
Toutefois, c’est dans une publicité de Coca-Cola, lancée
en 1931, que le Père Noël prit définitivement sa présentation
véritablement humaine, pour inciter les Américains à
boire de leur produit même en hiver. Grâce au talent artistique
de Haddon Sundblom, délivré de sa longue robe rouge, remplacée
par un pantalon et une tunique, il se voyait affublé d’un
ventre rebondissant, d’une figure charmante et d’un air jovial.
Pendant trente-cinq ans, cette même firme diffusa ce portrait du
Père Noël autant dans la presse écrite que par la télévision
partout dans le monde.
Voilà comment, de nos jours, le Père Noël présente
un portrait unique. Il s’agit d’un un vieillard bien gaillard
et jovial, doté d’une grande barbe blanche, revêtu
d’une longue houppelande rouge, bordée de fourrure, et coiffé
d’un bonnet rouge, également paré de fourrure immaculée,
qui porte sur son dos une hotte remplie, même plus souvent débordante,
d’étrennes de toutes sortes (jouet et friandises surtout).
Cependant, pour s’ajouter un peu de merveilleux, comme il habite
au Pôle Nord, avec son épouse et ses nains (des elfes), il
se déplace dans airs sur un traîneau tiré par huit
ou neuf rennes, pour déposer, durant la nuit de la veille de Noël,
des cadeaux au pied de la cheminée ou d’un arbre décoré,
destinés aux enfants méritants. On comprendra que les Européens
du Nord préfèrent le faire habiter dans les montagnes de
Korvatunturi, dans la province du Lapland, en Finlande. Quant aux Russes,
ils opinent qu’il existait un quatrième roi mage qui se serait
perdu dans leur steppe, dans sa quête pour trouver l’enfant
Jésus. Depuis deux mille ans qu’il erre en vain à
travers le monde, il a renoncé à retrouver le Messie, mais
il lui plaît de distribuer des cadeaux aux enfants qu’il rencontre
en cours de route.
Cette coutume du partage des cadeaux remonte à l’Antiquité,
alors qu’on s’en échangeait lors du fameux solstice
d’hiver. Chaque année, les gens étaient remplis de
la peur panique que le soleil, qui déclinait de jour en jour, ne
se remonte plus un bon jour. Alors, ils témoignaient des meilleurs
sentiments pendant cette période de l’année, lançant
au ciel nombre de prières. Par la suite, ce sont les seigneurs
des campagnes et les bourgeois des villes qui perpétuèrent
cette tradition en distribuant aux enfants quelques gâteries. Une
fois l’habitude acquise, on leur a substitué peu à
peu quelques personnages légendaires avant d’adopter le trop
célèbre Père Noël.
C’est bien beau d’avoir longtemps cru, chez les plus croyants,
que, à Noël, c’était le Petit Jésus qui
apportait des présents aux enfants sages. Mais, pour leur part,
les chercheurs sincères savent que, les cadeaux les plus beaux,
il faut se les offrir soi-même par sa créativité mentale.
Comme ils savent que ce n’est pas que dans le Temps des Fêtes
qu’il faut rayonner l’amour, la générosité
et la paix et déployer ses réserves de fraternité
et de solidarité. À bien y penser, puisque cette célébration,
qui marque le début de la saison hivernale, a complètement
dégénéré en orgie de plaisirs et en délire
de consommation, peut-être a-t-elle perdu son sens et sa saveur?
Et peut-être que, pour cette raison, on la verra commencer à
s’étioler avant de disparaître, bientôt, pour
toujours? Ce n’est peut-être qu’alors qu’on pensera
à en faire la célébration du Retour de la Lumière.
Quoi qu’il puisse arriver, c’est dans l’Amour le plus
sincère que nous souhaitons à tous un très Joyeux
Noël et une Nouvelle Année des plus merveilleuses. Car ce
nouveau cycle promet déjà d’amener, à plus
d’un, la manifestation de leurs rêves les plus grandioses.
2010 ne s’annonce-t-il pas comme l’an des Réalisations?
©
2009 Bertrand Duhaime (Douraganandâ) Note
: Nous accordons le droit de reproduire ce document dans la mesure où
on le reproduira intégralement --donc sans aucune suppression,
modification, transformation ou annotation-- se donnant la peine d’en
préciser le nom de l’auteur, Bertrand Duhaime (Douraganandâ),
la source, www.lavoie-voixdessages.com,
et d'y joindre également, au complet, en tête ou en pied
de texte, la présente directive, donnée en note.
Noël
2008 Les bons voeux de Paulo Coelho
...
La musique qui venait de la maison....
Comme
toujours la veille de Noël, le roi convia le Premier ministre à
une promenade. Il lui plaisait de voir comment on décorait les
rues. Mais pour éviter que les sujets ne fassent des dépenses
exagérées pour lui être agréables, ils se déguisaient
toujours en commerçants venus de lointains pays.
Ils marchèrent dans le centre, admirant les guirlandes lumineuses,
les sapins, les bougies allumées sur les marches des maisons, les
baraques où l’on vendait des cadeaux, les hommes, les femmes
et les enfants qui se pressaient d’aller rejoindre leurs parents
pour fêter cette nuit autour d’une table bien garnie.
Sur le chemin du retour, ils traversèrent le quartier le plus pauvre
; l’ambiance y était tout à fait différente.
Pas question de lumières, de bougies, ni de l’odeur délicieuse
de la nourriture bientôt servie. On ne voyait personne ou presque
dans la rue, et comme il le faisait tous les ans, le roi fit observer
au Premier ministre qu’il devrait être plus attentif aux pauvres
de son royaume. Le ministre acquiesça de la tête, sachant
que sous peu le sujet serait de nouveau oublié, enterré
sous la bureaucratie quotidienne, l’approbation des budgets, les
discussions avec des dignitaires étrangers.
Soudain, ils remarquèrent que d’une des maisons les plus
pauvres venait le son d’une musique. L’habitation, de construction
sommaire, avait plusieurs fentes entre ses planches pourries, leur permettant
de voir ce qui se passait à l’intérieur. C’était
une scène totalement absurde : un vieux dans une chaise roulante
qui paraissait pleurer, une jeune fille complètement chauve qui
dansait, et un garçon au regard triste qui tapait sur un tambourin
et chantait une chanson du folklore populaire.
« Je vais voir ce qui se passe », dit le roi.
Il frappa à la porte. Le jeune garçon interrompit sa musique
et vint répondre.
« Nous sommes des marchands et nous cherchons un endroit pour dormir.
Nous avons entendu la musique, nous avons vu que vous n’étiez
pas couchés et nous aimerions savoir si nous pouvons passer la
nuit ici.
— Vous trouverez abri dans un hôtel de la ville, Messieurs.
Malheureusement nous ne pouvons pas vous aider ; malgré la musique,
cette maison est pleine de souffrance et de tristesse.
— Et pouvons-nous savoir pourquoi ?
— C’est ma faute – c’était le vieux dans
la chaise roulante qui parlait. Toute ma vie, j’ai voulu éduquer
mon fils pour qu’il apprenne la calligraphie et devienne un des
scribes du palais. Mais les années passaient et les nouvelles inscriptions
pour cette charge n’étaient jamais ouvertes. Et puis cette
nuit, j’ai fait un rêve stupide : un ange apparaissait et
il me demandait d’acheter une coupe en argent, parce que le roi
allait me rendre visite, boire un peu dans cette coupe, et trouver un
emploi pour mon fils.
« La présence de l’ange était si convaincante
que j’ai décidé de faire ce qu’il avait dit.
Comme nous n’avons pas d’argent, ma belle-fille est allée
ce matin au marché, elle a vendu ses cheveux, et nous avons acheté
la coupe qui est là devant vous. Maintenant ils essaient de me
faire plaisir, ils chantent et ils dansent parce que c’est Noël,
mais c’est inutile. »
Le roi vit la coupe en argent, se fit servir un peu d’eau parce
qu’il avait soif et, avant de partir, déclara à la
famille :
« Quelle coïncidence ! Nous étions aujourd’hui
avec le Premier ministre et il nous a dit que les inscriptions pour un
nouveau poste seraient ouvertes la semaine prochaine. »
Le vieux hocha la tête, ne croyant pas vraiment ce qu’il entendait,
et prit congé des étrangers. Mais le lendemain, une proclamation
royale fut lue dans toutes les rues de la ville : on cherchait un nouveau
scribe pour la cour. Le jour fixé, la salle des audiences était
pleine de gens désireux de concourir pour le poste tant convoité.
Le Premier ministre entra, demanda à tous de préparer leurs
blocs et leurs porte-plume :
« Voici le sujet de dissertation : pourquoi un vieil homme pleure-t-il
près d’une femme chauve qui danse et d’un garçon
triste qui chante ? »
Un murmure d’étonnement parcourut la salle : personne ne
savait raconter une histoire comme celle-là ! Excepté un
jeune garçon vêtu humblement, dans un coin de la salle, qui
fit un large sourire et commença à écrire.
Paulo Coelho
(conte indien)
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